Cet article “International” du mois d’août aurait dû être consacré au Traité commercial entre l’Europe et les USA (TAFTA). Mais “l’actualité” impose m’a-t-on dit, de revenir sur la Grèce.
Certes, mais pour dire quoi de plus que ce tout le monde peut trouver dans les mille et un articles de sensibilités différentes qui s’expriment sur le sujet ? Sujet qui plus est “casse-gueule” tant la passion l’emporte souvent sur la raison, y compris dans nos rangs cégétistes. Tsipras héros adulé hier par certains se voit aujourd’hui qualifié de traitre par les mêmes : insupportable raccourci !
Beaucoup de mots et d’expressions nous viennent immanquablement à l’esprit si l’on regarde ce qui s’est passé ces dernières semaines : Traité de Versailles, déclaration de soumission, auto-flagellation imposée, torture budgétaire politiquement toxique et économiquement inepte, misère, humiliation, coup d’état financier, pistolet sur la tempe, folie, vengeance destructrice, couteau sous la gorge, acharnement, férocité, chantage à la mort subite, nœud coulant…
Dès sa victoire Syrisa savait qu’une bombe de 15 milliards d’€ allait lui exploser entre les mains. Syrisa savait que la BCE en outrepassant ses prérogatives allait tout faire pour contraindre le gouvernement grec à renoncer à ses engagements. Syrisa savait qu’il ne serait pas confronté comme en 1967 à une légion de tanks commandée par des colonels, mais à une armada de banques et de dirigeants européens toute aussi mortifère.
Derrière ce mot, il y a des images violentes et des chiffres cruels : 1 million 500.000 chômeurs, 3 millions de grecs actifs et retraités précipités sous le seuil de pauvreté, baisse des salaires de 60 % en 5 ans, 30 % de la population privé de couverture sociale et d’accès au soin, enfants qui s’évanouissent en classe torturés par la faim, retour de la tuberculose…
Etre révolté face à cela (et on le serait à moins) ne doit cependant pas nous faire dévier du respect que nous devons au peuple grec et à ses choix majoritairement et démocratiquement exprimés. Que cela nous plaise ou pas, 229 députés grecs ont voté pour un “accord” (dont 149 de Syrisa), 64 contre (dont 32 de Syrisa) et 6 se sont abstenus.
Démocratie toujours, tous les sondages démontrent que 72 % des grecs ont jugé l’accord “nécessaire” et 68 % souhaite que Tsipras reste à la tête du pays. Nous n’avons aucune légitimité pour juger, pire pour condamner l’histoire grecque telle que le peuple est contraint à l’écrire sans illusion et dans la douleur. Il n’a besoin, dans notre champ de responsabilité, que d’une chose : une mobilisation syndicale d’ampleur exceptionnelle pour une autre Europe, sociale et solidaire, mobilisation qui a terriblement manqué ces dernières semaines.
Bien évidemment, nous étions nombreux à rêver “par procuration” d’une autre issue à ce bras de fer, mais en conscience, même sans y croire, le parlement grec, le peuple grec ont jugé que c’était la seule mauvaise solution pour éviter un cataclysme et une faillite absolus.
La stratégie arrêtée par les banques, Bruxelles et Berlin n’était finalement peut-être pas celle du “Grexit” mais celle du “Syrizexit”, et de ce point de vue elles ont échoués ! Maigre consolation ? Peut-être, mais nous CGT, ne lâchons rien, et surtout pas les grecs enfermés plus que d’autres dans la logique punitive d’un capitalisme du désastre.
Ne lâchons rien car les rapaces qui se repaissent de la dette et de la crise ne se contenteront pas de la Grèce. Déjà d’autres pays endettés sont dans leur viseur, et ne sous-estimons surtout pas non plus leur volonté de tuer partout l’espoir et de nous ouvrir qu’une seule porte noire ou brune : celle du “no futur”.
Notre porte à nous, celle dont nous avons individuellement et collectivement la clé, c’est celle dans face, celle qui est aux couleurs de la vie et de la lutte, celle qui ouvre en grand sur l’espoir et sur d’indispensables conquêtes sociales !
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Ancien lien : https://www.cgt-aura.org/spip.php?article1052