Depuis 2014, la gestion des fonds européens (FSE) a été confiée aux régions. A partir du constat de la sous utilisation de ces aides et de sa concentration sur quelques acteurs, le Ceser fait des propositions d’améliorations.
A partir du constat largement partagé d’une sous-utilisation dans notre région mais aussi plus largement dans tout le pays des fonds FEDER-FSE, la commission a travaillé à une analyse détaillée de cette sous-consommation et élaboré des propositions d’amélioration tout en sachant que les réponses ne peuvent pas être totalement régionales. Un grand merci à nos deux chargées d’étude Anne-Sophie Douza puis Ingrid Ranchin : elles ont réalisé un énorme travail de décryptage et de présentation qui a permis à la commission de disposer des données nécessaires à la réalisation de cette contribution.
Les fonds européens au service d’une « une croissance intelligente, durable et inclusive »
Les fonds FEDER-FSE sont les instruments financiers de la politique européenne dite de cohésion et il nous semble nécessaire d’en dire quelques mots :
Dès 1957, la politique régionale européenne est mentionnée dans le préambule du traité de Rome, elle repose sur un principe de solidarité financière entre les Etats membres. Ensuite, la cohésion économique et sociale est mentionnée dans les traités comme le Marché Unique ou l’Union économique et monétaire. Son objectif est de réduire les disparités de développement, économiques et sociales entre les différentes régions.
La politique de cohésion est la 2ème politique de l’UE après la PAC avec un budget de 351 milliards, soit près d’un tiers du budget global.}
L’Europe ne gère pas directement ces fonds, leur gestion est déléguée aux Etats membres ou aux collectivités territoriales. Depuis le 1er janvier 2014, le gouvernement français a délégué l’autorité de gestion aux conseils régionaux.
En mars 2000, les chefs d’Etats et de gouvernement, réunis à Lisbonne ont fixé une stratégie visant à faire de l’Europe « l’économie fondée sur la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique au monde », stratégie élargie ensuite au principe de développement durable. Selon les orientations stratégiques communautaires proposées par la Commission européenne et adoptées par le Conseil en 2006, les actions soutenues par la politique de cohésion pour la programmation 2008-2014 se concentrent désormais sur un nombre limité de priorités. Il s’agit d’améliorer l’attractivité, encourager l’innovation, l’entreprenariat et la croissance de l’économie de la connaissance en favorisant la recherche et l’innovation, créer des emplois plus nombreux et de meilleure qualité.
A partir de 2014 la stratégie dite « Europe 2020 » vise à promouvoir « une croissance intelligente, durable et inclusive » qui encadre l’ensemble des domaines d’action et impose un fléchage des financements de l’innovation vers des domaines de « spécialisation intelligente » (DSI). Coïncidant avec la régionalisation des fonds structurels, cette injonction conduit la Région Rhône-Alpes à assujettir l’ensemble de sa politique économique et d’innovation à cette logique de spécialisation en élaborant une stratégie régionale d’innovation pour une spécialisation intelligente (SRI-SI). Les programmes opérationnels qui encadrent l’utilisation des fonds structurels sont inscrits dans cette perspective. L’Etat agit de même dans le cadre des programmes d’investissement d’avenir qui développent des écosystèmes d’excellence.
Notre contribution présente quelques constats significatifs :
La répartition des programmes opérationnels FEDER-FSE est révélatrice :
o 45% sont consacrés à l’innovation, la recherche, les TIC, la compétitivité… : la croissance « intelligente »,
o 30% concernent la transition vers le bas carbone, l’environnement… : la croissance « durable »
o 25% la promotion de l’emploi durable et de qualité, la mobilité volontaire, l’éducation, la compétence et la formation : la croissance « inclusive »
L’accès aux financements européens nécessite de la part des collectivités, des entreprises ou des organisations une marge de trésorerie importante, puisque la règle européenne impose le co-financement des actions et l’avance des fonds parfois une année ou plus, ce qui favorise les institutions les plus puissantes… C’est une vraie difficulté pour nous, organisation syndicale. Quant aux collectivités territoriales, la nouvelle contractualisation financière avec l’Etat va encore réduire leurs marges de manœuvre utiles pour bénéficier des financements européens.
Des interrogations sur le futur
La prochaine programmation, l’ « après-2020 » suscite de fortes inquiétudes : les propositions de la Commission prévoient une augmentations des crédits consacrés à certaines priorités comme l’innovation, la recherche, la mobilité des jeunes, elles prévoient également une baisse des crédits affectés aux deux principales politiques européennes que sont la PAC et la politique de cohésion, et notamment du FSE.
De plus, la France, comme les états les plus riches se verrait imposer une concentration de 85% du FEDER sur 2 priorités : « une Europe plus intelligente (innovation, numérisation, mutations industrielles et soutien aux PME) », « une Europe plus verte et à zéro émission de carbone (accord de Paris, transition énergétique, énergies renouvelables et lutte contre le changement climatique). }
Si l’existence du socle européen de droits sociaux est évoquée dans le cadre d’une des priorités, les financements consacrés à l’éducation, la formation, l’inclusion, l’accès à la santé feraient à nouveau les frais de cette nouvelle programmation, alors que l’accroissement des inégalités entre pays et entre régions nécessitent des soutiens financiers plus importants.
L’avenir du budget de l’Union est cependant loin d’être stabilisé, le Parlement a, en effet refusé de voter les propositions de la Commission, ce qui a conduit le Conseil Européen de décembre à repousser le débat budgétaire aux lendemains de l’élection du Parlement en mai prochain.
J’en viens aux préconisations qui limitent leur champ à la responsabilité de la Région comme autorité de gestion des fonds :
Les nombreuses auditions réalisées par la commission ont mis en évidence, à la fois des champs d’interventions légitimes et non couverts et une impossibilité souvent pour les acteurs de bénéficier des fonds. …
Or, les 10 principaux porteurs de projets bénéficient de près de 60% des subventions attribuées et la Région Auvergne Rhône Alpes à elle seule concentre près de 40% de l’enveloppe programmée.}
Il est de la responsabilité de la Région en tant qu’autorité de gestion de favoriser une plus juste utilisation des fonds FESER et FSE, c’est un choix politique qui suppose une organisation des services à la hauteur des besoins.
Notre contribution les décline dans ses préconisations : assistance technique, information, mise en réseau, diffusion des expériences, avance de trésorerie…
Au-delà du suivi des préconisations et compte tenu des évolutions dans les politiques européennes qui interviendront dans les mois qui viennent, la commission s’est donnée comme objectifs une veille et un suivi du dossier au niveau européen et régional, ce qui pourrait permettre une information régulière de notre assemblée.
Le groupe CGT votera la contribution.
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Ancien lien : https://www.cgt-aura.org/spip.php?article1475