Intervention de la Cgt sur la contribution du Ceser « l’accompagnement durable à l’autonomie des mineurs non accompagnés isolés » (cliquer ici pour lire la contribution)
Pour la CGT, il est important que notre CESER se soit saisi de cette question dans un contexte où les trajectoires migratoires envahissent les discours politiques avec des contenus parfois très éloignés de la déclaration des droits de l’homme et de la convention internationale des droits de l’enfant, pourtant ratifiée par la France, notamment l’article 20 : « tout enfant temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et une aide spéciale de l’État y compris les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants, sans considération de leur nationalité, de leur statut au regard de l’immigration ou de leur apatridie ».
La contribution, présentée en Plénière ce jour, a une dimension qui dépasse largement celle de la région, les choix en matière de politiques d’immigrations relèvent des niveaux national et européen.
Pour autant, ce sont avant tout dans des territoires (le plus souvent non choisis) qu’arrivent les mineurs non accompagnés et c’est là que peut se réussir ou non leur accueil, leur accompagnement et donc in fine leur autonomie grâce à une stabilité administrative et juridique permettant leur insertion.
Dans les faits, la plupart des intervenants ont pointé lors de leurs auditions, les nombreux obstacles auxquels sont confrontés ces enfants.
Ainsi, la Défenseure des droits a pointé dans la présentation du rapport relatif aux mineurs non accompagnés au regard du droit, en février 2022 que :
« Les principales difficultés interviennent lors de l’évaluation préalable à leur entrée dans le dispositif de protection de l’enfance puis au moment où ils et elles atteignent leur majorité dès lors que la logique de suspicion vient à primer sur celle de protection. Le fait que leur âge et leur état civil puissent être remis en cause à tout moment de leur parcours les soumet à une insécurité juridique permanente ».
Par ailleurs, pour la CGT, le choix en 2016 de remplacer la dénomination des Mineurs Isolés Étrangers par celle de Mineurs Non Accompagnés a clairement marqué une différence fondamentale dans la prise en compte des besoins et des difficultés particulières de ces jeunes.
En effet, pour notre organisation syndicale, les mots ont un sens et l’emploi du terme « isolé » faisait référence à l’absence d’autorité parentale sur le territoire et donc à la nécessité pour les services de l’État d’assurer cette fonction de parents et de prendre en charge les mineurs, de les protéger et de les accompagner. Ce changement de vocable a donc fait glisser le gouvernement vers un désengagement de la prise en charge des jeunes, en ne considérant le problème que sous l’angle de l’absence d’accompagnement.
La mise en place du fichier biométrique AEM (Appui à l’évaluation de la minorité) en 2019 géré par les Préfectures, a encore accentué la stigmatisation de ces jeunes : L’État prenant la décision de s’immiscer dans la procédure d’évaluation, avec l’instauration du fichage biométrique, en récoltant des informations telles que les empreintes digitales, les coordonnées téléphoniques, les photographies …
Or, la plupart des mineurs non accompagnés fuient les guerres, les violences ou les discriminations. Ils mettent leur vie en péril lors de parcours migratoires longs, remplis de dangers, traversant de nombreux pays en conflits. La plupart des mineurs non accompagnés (MNA) sont victimes de violences physiques et psychologiques, d’abus sexuels et de trafics d’êtres humains, dans leur pays d’origine, au cours de leur exil ou à leur arrivée en Europe.
Bien qu’elles soient très minoritaires en nombre, la situation des jeunes filles est particulièrement alarmante, car elles sont souvent la proie de réseaux de prostitution ou de l’esclavage domestique.
Les MNA auront donc des difficultés à prouver leur minorité, faute de documents, d’obstacles liés à la langue, à l’isolement et la méconnaissance et l’accès aux dispositifs dont ils seront souvent exclus.
La DREES (Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques) a publié, en février 2023, une étude sur les jeunes accueillis en établissement de l’Aide Sociale à l’Enfance qui précise que :
Les mineurs non accompagnés entrent plus tardivement dans le dispositif de l’ASE. Juste avant leur entrée dans un établissement, un quart des MNA ne bénéficiaient d’aucune mesure de protection de l’ASE (contre un dixième des non-MNA) et un quart dormait en centre d’hébergement, dans un hébergement de fortune, une habitation mobile ou dans la rue (contre 2 % des non-MNA).
Néanmoins, seuls 5 % des mineurs MNA scolarisés sont en situation d’absentéisme et de rupture scolaire, contre 14 % des non-MNA.
C’est cette problématique qu’a choisie la commission en traitant notamment de la question des MNA sortis ou en marge des dispositifs, sous l’angle de l’insertion, de la formation professionnelle.
En effet, les conditions d’une insertion réussie sera bénéfique tant aux territoires accueillants et qu’aux migrants eux-mêmes. Ce qui nous a conduit à en examiner les conditions de réussite et aussi les obstacles.
Au terme du travail réalisé, nous partageons globalement les préconisations retenues concernant la mise à l’abri, l’évaluation de la minorité, la prise en charge sanitaire, l’orientation, la scolarisation et la formation.
Au-delà de l’insuffisance des financements, des défaillances des dispositifs, voire de la responsabilité des décideurs relatifs à l’accueil et la prise en charge des MNA, il parait opportun de pointer la souffrance et la détresse des mineurs, mais aussi celle des travailleurs, qu’ils soient agents publics ou salariés d’associations. Ce sont souvent eux qui essaient au quotidien, de pallier les insuffisances et dysfonctionnements dans le cadre de leur travail, mais aussi qui poursuivent leur action au sein de réseaux d’entraide au côté d’autres citoyens afin de protéger ces mineurs et leur permettre un avenir sécurisant.
Nous voterons la contribution.