Le Ceser est saisi sur le projet de contrat de plan Etat Région pour 2021/2027. Alors que le bilan du précédent n’est toujours pas disponible, qu’aucun des engagements de concertation n ‘a été respecté, ce nouveau contrat pose de nombreuses questions sans réponse.
Le CESER a été saisi dans le cadre d’un premier avis concernant l’élaboration du futur CPER qui se prépare dans un contexte inédit lié à la pandémie :
En effet, L’État a souhaité articuler :
• Une démarche de relance immédiate pour 2021 – 2022, formalisée par un accord Région / Etat formalisé en début d’année avec des crédits dédiés,
• L’élaboration du Contrat de Plan État-Région, portant sur la période 2021-2027 avec une enveloppe contractualisée spécifique.
Les deux démarches sont imbriquées et complémentaires, le plan de relance s’inscrivant au cœur des deux premières années du CPER.
Une action publique rendue illisible par des interventions croisées
Nous constatons une fois de plus que la suppression de la clause de compétence générale est détournée via le dispositif de compétences partagées. Ceci conduit la Région à intervenir hors du champ de sa compétence et donc de rendre encore plus illisible l’action publique : origine des différents fonds croisés, compréhension de ce qui relève des budgets déjà engagés et de ceux à venir, « recyclage » de fonds non utilisés sur les précédents contrats.
Toujours aucune information sur le taux d’exécution du précédent CPER
Sur ce dernier point, alors que l’État et la Région affichaient, lors d’une commission 4, un taux d’engagement de près de 90 % sur certains contrats, il parait utile de rappeler que le CESER n’a eu communication d’aucun tableau chiffré des taux d’exécution CPER depuis près de 5 ans. Le dernier avis, fin 2018, n’avait reposé que sur des informations orales communiquées par les services de la Région et de l‘État.
Dès lors, comment donner dans des conditions correctes, un avis sur de nouveaux contrats alors que nous ne disposons d’aucune évaluation chiffrée sur les précédents ? Bien que nous ne puissions qu’être d’accord avec les objectifs affichés relatif à la transition énergique et environnementale et à la « souveraineté industrielle », nous pouvons nous interroger sur leurs contenus et leurs déclinaisons. Ces objectifs impliqueraient une vision prospective et systémique, à l’opposé de la politique de guichet menée par l’Exécutif régional sur ce mandat ou de certains projets engagés tels que le contournement « Le pertuis-Saint-Hostien » par la RN88, qui est très loin de prendre en compte les besoins de préservation de la biodiversité et des terres agricoles.
Le nouveau CPER : toujours les mêmes solutions et les mêmes recettes
Concernant les axes en vue de rendre la Région AURA « la plus attractive et la plus compétitive de France », objectif vide de sens si l’on ne précise pas pour qui et au profit de qui, là aussi de nombreuses interrogations se posent : la concurrence et l’isolement sont-ils plus efficaces que la solidarité et la complémentarité avec les autres Régions pour développer les nouvelles filières ? Quand les principaux constructeurs de véhicules industriels européens coopèrent sur les motorisations hydrogène, les régions françaises peuvent-elles faire « chacune dans leur coin ? » En outre, l’autonomie des Régions ne doit pas signifier la fin des péréquations de traitements au niveau national.
De même, afficher un objectif de résorption des tensions sur l’emploi en répondant aux seuls besoins de l’entreprise apparait déjà un schéma d’un vieux monde qui tente de résister alors que ce sont aussi aux besoins de la jeunesse, à leurs aspirations les plus fondamentales en matière d’apport et de contribution à la collectivité, qu’il conviendrait de répondre.
Ces questions essentielles se posent aussi au regard des nombreux dispositifs déployés par les différentes politiques publiques à des échelons différents : État, Région, Métropoles, EPCI…. Comment assurer leur cohérence d’ensemble, quelle est la maille pertinente pour engager celles-ci de la meilleure façon ?
Ces différentes interrogations nous amènent au sujet de la gouvernance. Dans le rapport présenté sont mentionnés la mise en place des comités de pilotage et de suivi.
Opacité ou contrôle démocratique des fonds publics ?
Or, nous avons pu constater que les avis du CESER relatif aux taux d’exécution n’ont pas été sollicités, que les réunions n’avaient pas eu lieu telles que prévues. Cette déficience dans l’accompagnement des contrats pose un problème au niveau de leur suivi et évaluation, d’autant plus que l’ingénierie territoriale se concentre dans les collectivités les plus importantes. De plus, en Région, de nombreux acteurs pourraient apporter une réelle plus-value par leur expertise s’ils étaient auditionnés, à défaut d’être partie prenante. Ainsi sur les « Territoires d’industrie », il est dommageable que l’Exécutif ne tienne pas compte des propositions émises lors du Forum Industrie ayant réunis les partenaires sociaux en 2019 et que ceux-ci ne soient associés à la démarche dans une région largement couverte par ce dispositif.
Ainsi que nous l’exprimions dans le dernier avis de la commission 4 « quand la diversité des territoires dynamise Auvergne – Rhône-Alpes » il ne s’agit pas d’avoir un projet pour le territoire et de vouloir l’imposer à tous. Il s’agit, avant tout, de le partager collectivement et collaborativement pour qu’il puisse être porté par tous les acteurs. Pour cela, il conviendrait aussi de restaurer les lieux de dialogue et de négociation sociale au plus près des territoires et redonner des moyens et des droits nouveaux à ceux existants en entreprises.
En l’état actuel d’avancement du CPER, de nombreuses questions restent sans réponse :
• Dans la phase « plan de relance », le CESER aura besoin de suivre pour chaque territoire, les projets retenus, les fonds dégagés et les objectifs visés, ainsi que des indicateurs permettant le contrôle et le suivi des aides et des projets.
Par exemple, concernant le volet mobilité, en l’absence du détail des projets ni même du fléchage des travaux déjà programmés comme la ligne des Alpes, nous sommes étonnés sur les montants annoncés. Ce qui aurait pu être une excellente ambition pose de nombreuses interrogations. Car vouloir dépenser sur 2 années plus que sur l’ensemble du CPER précédent parait irréalisable à moins d’un renforcement très conséquent des équipes opérationnelles de SNCF réseau et d’une accélération de bon nombre d’études et de décisions.
• Dans la phase CPER, le CESER aura besoin de connaitre les projets structurants, leur articulation. Ceci concerne aussi les projets de développement en « filières » : quels sont les projets d’ensemble ? Quelles coopérations entre les entreprises concernées ?
• Quels moyens et quel rôle pour un travail efficace du comité de suivi annoncé ?
Il y aurait besoin de partir d’un état des lieux, d’un bilan du dernier CPER, de connaitre les objectifs visés et les indicateurs d’évaluations des projets mis en œuvre et financés sur fonds publics.
Par ailleurs, il parait important que les dispositifs soient mis en place également dans les départements, sous la responsabilité des Préfets.
Plus que jamais, la définition des politiques publiques doit s’ouvrir aux propositions alternatives émanant du monde du travail, des populations, et des territoires pour produire, travailler, consommer, se transporter autrement, afin de répondre aux besoins et en changer de modèle de développement, en s’appuyant sur une base industrielle respectueuses de tous et de l’environnement et des services publics dotés des moyens nécessaires à leur mission.
Le CPER, parce qu’il est un outil de convergences de politiques aussi structurantes que l’enseignement supérieur, la transition énergétique et environnementale, les infrastructures de mobilité et fret, devra prendre en compte cette nécessaire évolution sociétale, accélérée par la pandémie, sauf à accepter le risque d’accentuer les ruptures entre les citoyens et les décideurs politiques.
L’avis du CESER reprenant nos interrogations, nous le voterons.
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Ancien lien : https://www.cgt-aura.org/spip.php?article1595