Intervention au Ceser au nom de la CGT, CFDT, CFTC, CFE-CGC, UNSA, FSU et Solidaires
Une assurance contre les risques climatiques ?
Il y a un peu plus d’un an, le Conseil Régional saisissait le CESER sur la question de l’assurance – récolte et de sa généralisation auprès des agriculteurs pour couvrir les pertes financières lors d’évènements climatiques, et sur les possibilités d’interventions de la Région.
Après plusieurs auditions, la commission a conclu à l’inadaptation d’un tel dispositif au niveau régional, les réponses devant être recherchées au niveau national, voire européen.
Au-delà de cette préconisation, nous nous interrogeons toujours sur le « modèle assurantiel ». Il peut difficilement être une réponse face à un risque qui devient de plus en plus élevé, avec des coûts toujours plus lourds et donc des primes qui augmenteront alors qu’elles sont déjà jugées dissuasives. Si la condition de viabilité d’une assurance-dommage est liée à un partenariat public/privé comme évoqué, abondé par des aides publiques à hauteur de 90%, il serait alors plus pertinent de mettre en œuvre un modèle de « sécurité /assurance sociale » plutôt que de solvabiliser une activité privée lucrative.
Quel impact du changement climatique sur l’agriculture de notre région ?
Les auditions durant ce travail ont permis de prendre conscience que notre Région est particulièrement impactée, avec un réchauffement moyen de + 2°C depuis 50 ans et un climat à Lyon en 2010 qui ressemblait à celui d’Avignon en 1980. En 2021, nous serons probablement encore plus au sud …
Comme le dit l’avis, pour autant qu’elles apportent une réponse à des situations catastrophiques, pour former un filet de sécurité nécessaire, « quoi qu’il en coûte » , les solutions curatives ne sauraient suffire. La commission a insisté sur le besoin de faire « un pas de côté », mettant en avant la prévention et l’anticipation, plutôt que la réparation.
Il est désormais urgent de repenser et de changer les pratiques et nos comportements. Et le rapport indique à plusieurs reprises qu‘il est indispensable de changer de paradigme et de modèle agricole en profondeur. Même si la mutation du système agricole du jour au lendemain est difficile, elle ne peut plus être éternellement repoussée. Alors que le modèle agricole dominant favorisait l’industrialisation et la spécialisation des exploitations, le rapport invite à adopter une stratégie opposée, de diversification bref à « ne pas mettre tous ses œufs dans un même panier ». Cela nous semble être une bonne pratique qui permet de limiter l’impact lorsqu’un œuf ou deux se brisent !
Pour faire face aux conséquences dramatiques du réchauffement climatique sur l’agriculture, nous soutenons particulièrement les propositions du rapport qui invitent :
à l’anticipation et à une gestion du long terme, en favorisant une réelle approche agronomique, telles l’agriculture biologique et l’agroforesterie, en adoptant de nouvelles variétés ou cultures non irriguées, en replantant des haies qui servent également d’ombrage aux animaux, etc. ;
à renforcer la recherche et développement « de manière active et structurée [par] des collaborations en termes d’acquisition et de partage des données » et la diffusion de ses résultats « car aucun pays ne peut à lui seul résoudre les problèmes qui s’annoncent à l’horizon 2050. » ainsi que l’indique l’INRAE ;
à travailler les enjeux autour de la formation initiale et professionnelle des agriculteurs et des salariés.
De même, nous partageons la préconisation de l’avis concernant une nécessaire évaluation du récent plan de la Région intitulé « ADAPTATION DES SECTEURS AGRICOLE, ALIMENTAIRE ET FORÊT-BOIS FACE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE ». Le CESER pourrait s’emparer de cette question, au travers d’un travail transversal de questions évaluatives dans un premier temps.
L’agriculture et l’alimentation sont des biens communs. L’agriculture ne saurait appartenir aux seuls exploitants, surtout lorsque les agriculteurs reçoivent chaque année plus de 9 milliards d’euros d’aides directes publiques et font appel à la solidarité nationale en cas de coup dur. La gouvernance agricole pourrait être repensée, plus ouverte aux salariés agricoles, mais aussi à l’ensemble de la société civile.
Si le consomm ‘ acteur peut s’orienter encore plus vers des produits bio et locaux, son rôle ne peut plus se limiter à son acte d’achat. Le citoyen -consommateur doit pouvoir participer pleinement à l’orientation de l’agriculture, activité noble de l’aménagement de notre territoire, et à la définition des modes de production, plus ou moins favorable à la création d’emploi, à la qualité de notre alimentation et à l’évolution de l’environnement et du climat.
Ce sont ces mutations qui peuvent redonner à l’agriculture toute sa place dans la société, permettre de sécuriser les revenus de tous les travailleurs de la filière et attirer de nouveaux actifs sur ces métiers.
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Ancien lien : https://www.cgt-aura.org/spip.php?article1599