L’U2P, la Capeb, la Cgt, la Cfdt, la Cftc, Fo et la Cgc, organisations regroupées au sein de la Commission Paritaire Régionale Interprofessionnelle de l’Artisanat, se sont adressées au Préfet de Région sur les spécificités et les difficultés des salariés et des employeurs de ce secteur.
Les organisations membres de la CPRIA Auvergne-Rhône-Alpes (Commission Paritaire Interprofessionnelle de l’Artisanat) souhaitent vous alerter sur la position intenable des entreprises de l’Artisanat, de leurs dirigeants, de leurs salariés et apprentis dans le cadre de la crise sanitaire qui frappe notre Pays et le reste du monde.
Tout d’abord, nous constatons les injonctions contradictoires données, notamment au secteur du Bâtiment, incitant, d’une part, à la mesure de confinement généralisé de l’ensemble des citoyens telle qu’annoncée par le Président de la République et le Ministre de l’Intérieur le 12 mars et finalement une demande de poursuite d’activité des chantiers de BTP, annoncée par le gouvernement le 19 mars. Ceci crée nécessairement confusion générale et division entre professionnels ce qui n’est pas tenable. Pour le bâtiment nous attendons la publication du guide de l’OPPBTP qui permettra d’y voir plus clair sur les conditions du maintien du travail sur les chantiers. Globalement, il est plus que jamais nécessaire d’avoir une adaptation des mesures en fonction des secteurs, mais aussi en fonction des entreprises, des chantiers, des conditions de travail.
Le dirigeant doit-il mettre en danger la vie de ses salariés, apprentis, de ses clients, ou de la sienne dès lors qu’il n’est pas en capacité d’observer les mesures de protection de santé au travail auxquelles s’ajoutent les mesures barrières (par exemple à 3 dans un camion de 3 m3, porter un matériel lourd seul…) ? Cette mise en danger serait-elle de nature à être incriminée devant les tribunaux pour mise en danger d’autrui ? Quelle responsabilité de l’Etat implique-t-elle ? Quelle est la portée des responsabilités que le gouvernement entend engager ?
D’autre part :
bon nombre de négoces de matériaux ont fermé,
bon nombre de clients particuliers refusent l’accès aux chantiers,
bon nombre de salariés appliquent leur droit de retrait qui peut être demandé en fonction de leur état de santé et de leurs pathologies, mais aussi en raison de défaut d’application des mesures de sécurité en milieu collectif,
bon nombre de salariés doivent garder leurs enfants.
Pour les commerces de bouche (boulangerie, boucherie…) le travail s’effectue en mode dit « dégradé » :
absence de protection (masques, gants),
certains salariés des équipes ont exercé leur droit de retrait ou gardent leurs enfants,
les entreprises ne travaillent plus avec la restauration collective/traditionnelle qui a fermé,
la clientèle de particuliers concentre ses achats vers les grandes surfaces pour limiter ses déplacements.
De plus, dès lors que les CFA ont fermé à compter du 16 mars, les Chambres de métiers ont informé les entreprises qu’elles devaient accueillir les apprentis (dont les mineurs). Cette disposition autre que celle appliquée pour les lycéens de l’enseignement général et professionnel, engendre, de notre point de vue, une mise en danger incompréhensible et là aussi contradictoire avec les mesures de confinement, mais surtout une inéquité de traitement. Compte-tenu de la gravité de la crise sanitaire, il conviendrait d’obliger les apprentis à rester chez eux ; l’employeur devrait être déchargé de ses responsabilités pendant le temps où il est censé être responsable de l’apprenti, et le chômage partiel à temps plein devrait être la règle pour les apprentis.
Par ailleurs, s’agissant des métiers de services dont les taxis-VSL, les dirigeants ou leurs salariés ne sont pas, à l’heure actuelle, équipés de matériels leur permettant d’exercer leur activité dans de bonnes conditions de sécurité.
Concernant le soutien économique aux entreprises annoncé pour les commerces « non indispensables » : cafés, restaurants, coiffeurs, fleuristes, esthétique… le montant de la perte d’exploitation pourrait être compensé à hauteur de 1500 €. Nous considérons que la date de départ de calcul de la chute du chiffre d’affaires devrait être celle du début du confinement et non pas début mars. Nous notons aussi des mesures qui favorisent les grandes surfaces aux dépens des employeurs et des salariés de l’artisanat : en effet, l’obligation de fermer pour certains secteurs comme la fleuristerie a créé des distorsions de concurrence puisque les grandes surfaces ont pu poursuivre leur vente. D’autre part, comment les salariés de l’artisanat pourraient-ils bénéficier d’une prime de 1 000 euros alors que le chiffre d’affaires a chuté ? Quid d’un dédommagement pour les stocks confectionnés mais non vendus notamment pour les fêtes de Pâques (pâtissiers, chocolatiers, traiteurs …) ?
Nous attirons aussi votre attention sur le nombre d’organisations professionnelles qui suggèrent la constitution d’un fonds d’assurances mutualisé exceptionnel en incluant dans le « cas de force majeure », la notion de « catastrophe sanitaire ».
Monsieur le Préfet, les 9 organisations membres de la CPRIA soulignent :
le risque majeur de casse économique et sociale massive dans les TPE de l’Artisanat qui ne pourront pas supporter 2 mois sans activité,
l’absolue nécessité pour les chefs d’entreprises et pour les salariés d’avoir des interlocuteurs bien identifiés pour répondre à leurs interrogations,
le besoin de partager, en réunion téléphonique, comme cela se fait dans beaucoup d’autres régions, entre vos services, ceux du Conseil régional et avec les partenaires sociaux, nos informations et nos remontées de terrain afin de proposer aux TPE de l’Artisanat des solutions claires, cohérentes et adaptées à cette crise inédite.
Il y a encore beaucoup de questions qui vont apparaître et beaucoup d’inconnu, nous restons à votre disposition pour tout échange selon des modalités à définir, dans un esprit de responsabilité, d’intérêt de la Nation, de sauvegarde de l’activité économique et sociale et de la protection des citoyens que nous sommes tous.
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Ancien lien : https://www.cgt-aura.org/spip.php?article1538