L’AMI (Accord Multilatéral sur l’Investissement) remonte déjà à 20 ans (1995/1997). Mais notre mémoire collective n’a rien oublié des mobilisations en France, en Europe et dans le monde pour qu’il ne voit pas le jour. Et dans ce combat provisoirement victorieux la CGT avait pris toute sa place.
Mais depuis 2013, sous l’inoffensif nom de TAFTA il revient lentement, plus hideux, plus libéral, plus dangereux que jamais.
Pour faire simple, s’il devait entrer en vigueur, et le risque est bien réel, les privilèges des multinationales prendraient alors force de loi, et avec une poigne de fer lieraient les mains des gouvernants. Imperméable aux alternances politiques et aux mobilisations populaires, une junte de chargés d’affaire et d’avocats apatrides s’assurerait de gré ou de force à le faire appliquer quel qu’en soit le prix pour les peuples.
Bien évidemment toutes les négociations en cours se déroulent derrière des portes closes. Sur 712 réunions, 628 (88%) se sont tenues dans le plus grand secret avec le monde des affaires et seulement 74 anesthésiantes, avec des groupes d’intérêts public.
L’impérieuse volonté de soustraire le chantier du traité américano-européen à l’attention du public se conçoit d’ailleurs aisément tant il fait le lit comme jamais des multinationales particulièrement dans les quelques (rares) secteurs qui lui échappent encore en partie.
Sécurité des aliments, normes de toxicité, assurance-maladie, prix des médicaments, liberté du Net, protection de la vie privée, énergie, culture, droits d’auteur, ressources naturelles, formation professionnelle, équipements publics, immigration : pas un domaine d’intérêt général qui ne passe pas sous les fourches Caudines du libre-échange institutionnalisé. L’action politique des élus se limiterait alors à négocier auprès des entreprises ou de leurs mandataires locaux, les miettes de souveraineté qu’ils voudraient bien leur consentir.
Il est d’ores et déjà stipulé par exemple que les pays signataires assureront la « mise en conformité de leurs lois, de leurs règlements et de leurs procédures avec les dispositions du traité ». 75000 (grandes) sociétés sont d’ores et déjà prêtes, la bave aux lèvres, à se jeter dans cette nouvelle chasse aux trésors publics.
A Washington, les lobbyistes ont de bonnes raisons de croire que les dirigeants européens, français en tête, sont prêts à n’importe quoi pour raviver une croissance économique moribonde.
L’UE y « gagnerait » (mais oui, ingrats que nous sommes) 0,06% de croissance de PIB. On est là à l’évidence dans la marge d’erreur, dans l’infinitésimal, dans l’imperceptible, et qui plus est dans la boule de cristal de Madame Irma dans la mesure où rien n’est à attendre en éventuelle hausse de PIB avant… 2027 !
L’UE y « gagnerait » la création de cinq cent mille emplois (en regard des 27 millions de chômeurs). Rappelons ici que le plan d’investissement de la CES permettrait de créer en 10 ans entre 7 et 10 millions d’emplois décents si l’on en imposait la mise en place.
Ne reculant devant rien j’ai fait l’effort (sous la chaleur aoûtienne) de lire les écrits de Pierre Moscovici, le célèbre « recasé » Commissaire Européen. Besogneux, il a entrepris la promotion du révoltant traité. Sans surprise son argumentaire manque de force.
Dans un premier temps il a osé soutenir publiquement que « le TAFTA est plus dans l’intérêt de l’Europe que des Etats-Unis », au motif que le marché étasunien est moins ouvert que le marché européen. En clair il nous avoue, l’inconscient, que l’Union Européenne a bien plus ouvert ses marchés que les Etats-Unis ! Et il faudrait faire confiance à cette même commission pour la nouvelle négociation ? Jamais !
Voilà pourquoi il faut continuer à se mobiliser, et à mobiliser ! CGT, AFL-CIO, CES avec beaucoup d’autres, organisations syndicales et ONG, nous avons les moyens d’avoir la peau de ces accords et du TAFTA !
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Ancien lien : https://www.cgt-aura.org/spip.php?article1059