Les Contrats à Impact Social (CIS) sont une financiarisation de l’action sociale.
Ce nouveau système de financement des actions sociales, qui relèvent normalement de financements publics fait intervenir des investisseurs privés. Ceux-ci investiraient dans des projets sociaux et se verraient ensuite rembourser par l’Etat les sommes investies avec un fort taux d’intérêt.
Ce remboursement est conditionné par la réussite de l’action menée, évaluée sur la base d’objectifs fixés par l’investisseur et par l’Etat.
Ainsi par le biais des CIS, le bien commun n’est plus financé par l’État. Celui-ci mandate des entreprises privées à but lucratif pour investir dans des projets d’actions sociales, entreprises envers lesquelles il contracte une dette. Dette qu’il devra rembourser sur du très long terme et avec des intérêts plus ou moins importants.
C’est une prise en main de la Finance sur les politiques sociales comme en son temps les concessions des autoroutes transférées à Vinci, ou le financement de la ligne Paris-Bordeaux par…le même Vinci
La Sauvegarde du Nord alors dirigée par Christophe ITIER, devenu depuis Haut-Commissaire à l’Economie Sociale et Solidaire a eu pour projet d’établir un CIS avec la BNP.
Ce CIS d’« Aide éducative en Milieu ouvert renforcée » avait pour objectif de « réduire le taux de placement moyen des enfants d’un point en 3 ans » en « missionnant 10 travailleurs sociaux, qui seraient intervenus en complément des équipes habituelles, auprès de familles dont la situation rend possible un placement des enfants ».
Sur un programme de ce type, en moins de 7 ans, la somme qui aurait dû être remboursée par le secteur public, autrement dit le contribuable aurait doublée.
L’intermédiaire financier et l’évaluateur devraient aussi être rémunérés… on ne voit pas, sinon à très court terme, où est l’hypothétique économie d’argent public.
L’« innovation » ainsi présentée réside dans le fait qu’un investisseur privé indexe la rentabilité d’un placement financier sur un projet social, relevant pourtant de prérogatives de l’État.
Habituellement, celui-ci, délègue une mission de service public à des acteurs associatifs qu’il subventionne. Dans cette configuration, l’État reste pour autant le garant de l’application des règles du droit.
Les acteurs du CIS font fi des conflits d’intérêt.
La Sauvegarde du Nord proposait le Comptoir de l’Innovation comme intermédiaire financier et KPMG comme évaluateur de son action.
Or le MOUVES (MOUVement des Entrepreneurs Sociaux) dont faisait partie M. Itier, a pour trésorier le directeur général du Comptoir de l’Innovation et KPMG comme partenaire.
L’action initiée par la Sauvegarde du Nord pose d’importantes questions d’éthique, de secret professionnel et d’autonomie de la décision du juge.
Pour l’instant ce projet n’a pas abouti.
Les « Apprentis d’Auteuil » avaient également un projet de CIS dans le cadre de la protection de l’enfance. Le but est d’économiser le coût de placement d’enfants en s’appuyant sur des familles relais. Il devait se déployer dans 3 départements à partir de la fin de l’année 2017. (Cf « la vie des idées.fr »)
Les associations deviennent avec ce dispositif des prestataires de service à moindre coût.
Ce type de financement ne peut que se concentrer sur les grosses structures. La loi sur l’économie sociale et solidaire (ESS), votée en juillet 2014, facilite d’ailleurs les fusions d’associations.
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Ancien lien : https://www.cgt-aura.org/spip.php?article1458