La Région Auvergne Rhône Alpes présentera lors de la plénière du 9 juillet 2020 les éléments budgétaires de son plan de relance.
Le CESER AURA a été saisi par l’Exécutif Régional pour donner un avis sur le budget supplémentaire qui sera voté cette semaine par la Région. Nous pouvons saluer cette initiative, compte tenu que l’ordonnance relative à l’État d’Urgence ne l’y obligeait pas.
Mais, au regard des circonstances, avec une crise sanitaire qui pourrait conduire à une crise économique et sociale de très grande ampleur ,et pour un « budget supplémentaire » qui conduit à engager les première mesures du plan de relance économique élaboré par la Région, Il aurait été néanmoins intéressant de pouvoir être saisi plus en amont, notamment sur l’aspect du plan de relance, comme en Région Pays de Loire, où la Présidente est intervenue en bureau du CESER le 4 mai pour présenter les mesures d’urgence mises en place par la collectivité et lui demander de préparer des propositions qui pourraient être étudiées dans le cadre d’un « plan de relance » que prépare la Région à l’été.
Nous intervenons donc à postériori, néanmoins, le plan étant étalé sur plusieurs exercices, il est permis de penser que notre avis contribuera à éclairer l’Exécutif sur des mesures à prendre pour empêcher que la crise sanitaire n’entraine un désastre économique, social et environnemental. Et il est encore temps pour engager cette concertation, que ce soit avec le Ceser qui, sous la mandature précédente, avait produit un avis en amont de SRDEII ou, encore, avec les organisateurs du Forum de novembre 2019 « Réussir la transition industrielle » qui ont travaillé sur la mise en forme des échanges.
Nous partageons globalement l’avis du CESER concernant le dispositif, notamment sur le manque de lisibilité du chapitre dépenses du plan.
Néanmoins, nous estimons que le plan de relance aurait pu être beaucoup plus ambitieux, compte tenu du budget global de la Région et de sa capacité d’investissement tant vantée par l’Exécutif : Ainsi, ce plan de relance devrait monter en puissance au fil du temps à partir de 2021 (40M€ en crédits de paiement en 2020 seulement). EN 2020, il y aura 334 M€ de dépenses nouvelles dont 294 M€ au titre de crédits d’aide d’urgence.
Nous déplorons que les aides allouées le soient sans critères précis. Toutes les aides se font sans que soit évoqué la moindre conditionnalité en matière sociale, environnementale, sans la moindre conditionnalité concernant le versement de dividendes, sans aucune conditionnalité concernant le maintien et le développement des emplois, sans conditionnalité sur l’obligation d’obtenir un avis favorable du CSE de l’entreprise.
Or, comme l’exprime le collectif regroupant associations et syndicats dans une tribune du journal le Monde du 3 juillet : « Face à l’urgence écologique et sociale, nous ne pouvons plus nous contenter des vœux pieux des grandes entreprises ».
Pire, c’est sur une « stratégie du choc » que le gouvernement entend tabler, profitant de cette crise pour adosser son projet de relance de l’activité, sur la multiplication des plans de « performance collective », plans qui reposent généralement sur un mix de hausse du temps de travail, baisse des salaires, dégradation des conditions de travail et de vie au travail . Et ce, sans garantie quant à la pérennité des emplois, ainsi qu’en font l’expérience les salariés de Smart . Cette voie est inacceptable, car les salariés ont déjà payé un lourd tribut à la crise, et elle va conduire irrémédiablement à une récession économique.
Nous regrettons également que dans le plan de relance, alors qu’il est question d’un « green deal à l’échelle du territoire » et d’« intensifier les investissements pour les mobilités propres », rien ne soit prévu pour le ferroviaire .C’est un des modes de transports le moins polluant et surtout très utile aux auvergnats rhônalpins pour se déplacer. De plus la SNCF est la seule entreprise de transports qui ne bénéficie d’aucune aide même dans le plan de soutien. Elle serait au contraire taxée de 110 millions d’€, sans équité avec les autres opérateurs.
Ces deux éléments démontrent bien que l’exécutif du conseil régional a des difficultés à prendre en compte l’aspiration des électeurs en faveur de l’environnement et reste arcbouté sur des schémas du vieux monde…
Nous n’oublions pas que, si cette pandémie est inédite par son ampleur, elle n’est pas une surprise pour tout le monde, les alertes par les scientifiques et les climatologues ont été nombreuses et pas entendues. Alors que les partisans de ce vieux monde s’accrochent encore à l’espoir qu’il ne s’agirait que d’une crise sanitaire, qui plus est, conjoncturelle, nous partageons l’analyse portée par des nombreuses voies, telles que celle de J.M.Harribey, voyant dans cette crise « l’imbrication inédite d’une crise sociale et d’une crise écologique ,dont la crise économique est la traduction quantitative de l’impasse capitaliste ».
Relever ce défi qu’impose la situation rend donc nécessaire de mener une politique ambitieuse et coordonnée pour construire et innover pour un monde encore possible.
Or quelle cohérence, quelle coordination, quelle convergence entre les différentes initiatives prises et les « enveloppes financières » annoncées ?
Le constat que nous pouvons faire c’est une absence totale de coordination au profit d’une mise en concurrence exacerbée entre territoires, à l’échelle européenne comme à l’échelle des régions françaises.
C’est ainsi que chaque région se veut la plus attractive pour attirer les entreprises ou , comme le préconise l’exécutif Aura, pour attirer les « talents ».
La responsable de l’agence économique évoque, concernant les mesures pour attirer les talents, des facilités pour accéder à un logement, pour le travail du conjoint…
Jusqu’au faut-il aller pour attirer les entreprises, les talents ? L’institut de l’entreprise (think tank très libéral) préconisait dans un précédent rapport d’offrir des primes pour attirer des talents, mesures qui n’étaient jusqu’alors « réservées » aux cadres dirigeants des multinationales, engageant des fonds privés.
C’est ainsi chaque région se veut la plus innovante pour devenir le numéro 1 pour le développement des énergies renouvelables (autour de l’hydrogène en Aura), les industries et technologies de la santé, le numérique…il est totalement illusoire de prétendre développer de telles ambitions à l’échelle d’un seul périmètre régional.
En Aura, s’il est fait allusion à un travail éventuel avec d’autres collectivités territoriales de la région, il est rarement fait état de travail avec d’autres régions ou avec l’Etat. Quant à L’Europe, elle n’est citée que pour capter d’éventuelles aides alors que la taille et la position géographique de notre région lui ouvre des opportunités et lui confère des responsabilités particulières. Un autre axe de coopération est à construire avec les métropoles, qui constituent désormais un acteur économique incontournable. D’autant que, dans la région, celles-ci peuvent contribuer à équilibrer le territoire.
Un dernier point pour souligner que l’augmentation drastique de l’abstention lors des dernières élections municipales doit nous interroger sur la légitimité de l’action publique, l’avenir de notre démocratie et du vivre ensemble et la manière de leur redonner un sens.
Nous voterons l’avis du CESER.
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Ancien lien : https://www.cgt-aura.org/spip.php?article1560