Au cours du mois de juillet, j’ai été amené à me rendre successivement au Sénégal, au Congo Brazzaville et en République Démocratique du Congo pour représenter la CGT.
Dans chacun de ces pays j’ai eu ou j’ai saisi l’occasion de parler, de décortiquer et de démontrer tous les dangers de cette loi « Travail » imposée aux forceps du « 49-3 ». Les réactions lucides et intéressées des militants syndicaux ou associatifs rencontrés ont toujours été à la hauteur voire au-delà de mes attentes.
C’est de la tribune du congrès de la Confédération des Syndicats Autonomes du Sénégal, que j’ai pu le plus longuement m’exprimer en appelant tous les camarades à se retrouver « comme jamais dans un syndicalisme qui s’attaque avec la détermination de ceux qui savent qu’ils ont raison, au dogme d’un libéralisme destructeur de vies et de rêves ».
Nos amis présents qu’ils aient été sénégalais, burkinabè, mauritaniens, maliens ou turcs ont tous affirmé devant les responsables de la CSI et de la CSI-Afrique, qu’au-delà d’une solidarité naturelle entre syndicalistes, qu’au-delà d’une solidarité militante, ils ont tous un intérêt naturel à nous voir gagner car chacun(e) à Dakar était convaincu que si la loi El Khomri arrivait à ses fins, arrivait à dynamiter nos droits et notre Code du Travail en France, le leur, mauvaise copie du notre suivrait la même descente aux enfers. Bon nombre de propos se terminait sous des applaudissements et par un : « Nous sommes ensemble ! » qui faisaient chaud au cœur !
Au-delà de sa responsabilité militante en France, la CGT porte bien au-delà de nos frontières et de ce que l’on peut imaginer, non pas un modèle (!), mais une image extrêmement forte ; celle d’une détermination sans faille, celle d’une résistance de tous les instants et contre toutes formes d’injustice sociale… Celle d’une CGT qui porte haut son irrépressible volonté de gagner même sous un orage d’interdictions, de répressions et de propagande nauséabonde. Notre désormais internationalement connu « On ne lâche rien ! », notre « Tous ensemble, tous ensemble ! » provoquent ici et là de saines envies de victoires à partager !
Nous avons également saisi cette opportunité sénégalaise pour nous rendre dans un village éloigné de 150 km de Dakar, village qui aurait pu être perdu au bout d’une piste sablonneuse sans fin, mais qui grâce à la solidarité de la CGT via notre « Avenir Social » voit ses femmes militantes et courageuses, regarder désormais l’avenir avec optimisme.
Visite militante au village de MBOKHODANE
MBOKHODANE est un village très étendu d’à peu près 5000 habitants.
Notre délégation CGT y a été accueillie très chaleureusement. On peut même parler de vraie complicité entre certaines villageoises et la camarade de la CGT présente avec moi.
De nombreux témoignages (féminins !) ont montré à quel point leurs conditions de vie et de travail sont harassantes : corvées d’eau dès 04 heures du matin, de bois de chauffe, travaux dans les champs, s’occuper des enfants, des repas, moudre (piler) les graines de mil… Si une seule de ces tâches prend plus de temps que prévu c’est leur disponibilité pour « apprendre » qui est remise en cause.
Elles ne savaient pas lire, pas compter, et ne rêvaient même pas d’avoir accès un jour à cette connaissance libératrice et gage d’indépendance, et pourtant avec l’appui de l’ « Avenir Social » elles l’ont fait !
La salle de cours actuel étant en branchage et en paille, elle est annuellement détruite au moment de la brève saison d’hivernage. Les femmes de MBOKHODANE aspirent à avoir une salle « en dur » qui serait leur lieu pérenne d’éducation, de rencontres, d’échanges et de partages, un lieu « bien à elles » (coût de cette structure solide : 3000€). C’est beaucoup, et si peu à la fois…
Les femmes de MBOKHODANE sont censées accoucher au dispensaire éloigné d’une dizaine de km des différentes parcelles. Mais il arrive assez fréquemment qu’au regard de cette distance effectuée à pied ou en charrette tirée par un âne (deux heures), bon nombre de femmes accouchent en chemin. Dans ce cas l’accoucheuse exige d’être payée le double (10.000 FCFA (15€) au lieu des 5000 normalement prévus). Ainsi va la vie à MBOKHODANE…
Contrairement à d’autres missions CGT que j’ai pu effectuer dans des villages de divers pays africains, ici le lien entre femmes agricultrices et le syndicat (la CSA en l’occurrence) est omniprésent. Elles se retrouvent parfaitement dans la démarche de ce dernier. Elles attendent davantage de lui en terme d’émancipation qu’en aides plus concrètes (moulin à grains, …) même si ces dernières sont évidemment évoquées, car moteur de l’émancipation revendiquée. Merveilleuses rencontres…
Une toute dernière phrase pour redire que la situation sociale en France, et à la demande des personnes rencontrées, a tenu une place importante tant dans tous les échanges que j’ai pu avoir tant Dakar, qu’à à Brazzaville dans une rencontre avec des ONG et devant la représentante (sans réaction !) de l’Ambassade de France, qu’à Kinshasa devant l’Intersyndicale nationale.
Le 15 septembre ils et elles étaient, je n’en doute pas, devant leur téléviseur à l’affut des informations diffusées par TV5 ou France24 !
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Ancien lien : https://www.cgt-aura.org/spip.php?article1247