Le rapport sur les orientations budgétaires 2017 s’inscrit dans la continuité de l’édition 2016. Le fil conducteur reste le même. La critique de la gestion de l’exécutif précédent y tient lieu de justification pour imposer une baisse drastique des dépenses de fonctionnement et augmenter les capacités d’autofinancement. Les OB 2017 confirme la place centrale de cet indicateur.
Ce postulat suscite un questionnement : plutôt que de ressasser l’évolution de ratios comptables, et de façon plus anecdotique, les notes de taxi et de téléphone, à quelle échéance la majorité en place s’appuiera-t-elle sur les résultats de ses propres politiques pour déterminer les orientations budgétaires ? Si la comptabilité publique a mis en évidence ces ratios qui sont surveillés de près depuis qu’ils ont intégré les grilles de lecture des agences de notation, ils ne seront jamais représentatifs de la « vraie vie » de la population de la région et de la vitalité de ses territoires.
Ceci renvoie directement à l’enjeu que représente l’évaluation de cette stratégie qualifiée « de rupture », de ses effets mesurables à court terme. La notion de rupture ne peut d’ailleurs pas masquer une réalité : la politique d’austérité proposée à travers ces orientations budgétaires ne fait pas suite à une politique de la région « providence », ce n’est pas l’esprit de responsabilité qui succèderait à la gabegie financière . Les marges de manœuvre des collectivités territoriales, plus particulièrement les régions, sans autonomie fiscale, sont rognées depuis longtemps. La poursuite du désengagement de l’Etat sera ainsi un autre marqueur important du budget 2017 puisque celui-ci s’affiche à 58 millions d’euros. Il s’agit d’un mouvement général. Il est complètement illusoire de croire que le budget régional pourrait s’en affranchir en ajoutant de l’austérité à l’austérité. Les départements de toutes sensibilités politiques font aujourd’hui ce triste constat. A cet égard la rupture proposée pourrait prendre l’allure d’une fuite en avant.
Pour en revenir à l’évaluation, l’emploi constitue évidemment un item essentiel. Le chiffre de 70 000 emplois créés en lien avec la dynamique nouvelle des investissement ne constitue pas un engagement. Sa vérification concrète reste improbable, sauf à se fier, comme il nous est proposé, à des standards macro- économiques invérifiables. L’évaluation renvoie à des outils existants ou à construire au plus près des politiques et leurs dispositifs qui associent l’ensemble des acteurs sociaux et économiques. Cette dimension sociale de la démocratie est complètement absente du rapport qui nous est soumis. Après la suppression du Fonds Régional Action Urgence (FRAU) et de la commission SUivi EVALuatioN, (SUEVAL) c’est la confirmation d’un parti pris : contester aux organisations syndicales, sur le champ territorial, l’exercice d’un droit formalisé à l’expression d’un diagnostic, de propositions et d’une expertise. Même si ce sont les organisations de salariés qui sont les premières visées par cet ostracisme, les conditions de consultations du CESER illustrent aussi la considération de l’exécutif pour l’ensemble de la société civile. Nous soutiendrons toutes les interventions de la présidence pour faire évoluer cette situation.
S’agissant des coupes claires opérées dans les dépenses de fonctionnement, la CGT affirme avec d’autres qu’il est possible aujourd’hui d’en mesurer les premières conséquences sur l’emploi. Le recensement non exhaustif et non définitif auprès des associations et organismes contraints de procéder à des suppressions de postes, des licenciements du fait de la baisse des subventions laisse apparaître un premier bilan d’un millier d’emplois perdus. (215 pour le seul secteur culturel). La coopération décentralisée est ridiculement comparée à une agence de voyage pour justifier une baisse de 50% de ses moyens alors qu’elle mobilise 1500 salariés et 100 000 bénévoles pour défendre des valeurs universelles très malmenées dans la période. Si des doutes devaient s’exprimer sur cette évaluation, un travail spécifique du CESER pourrait être engagé pour approfondir ce recensement. La CGT y est en tout cas favorable.
Un plan social, c’est très concrètement le premier bilan que l’on peut dresser d’un choix majeur au prétexte de ses vertus budgétaires. Un plan social disséminé, sans couverture médiatique mais bien réel pour les salariés concernés en terme de difficultés et de souffrance, pour le tissu social et le vivre ensemble dégradé, pour l’économie des territoires affaiblie, souvent les plus fragiles. Les conséquences dépassent la vision étroite de l’évolution d’un ratio comptable. Elles dépassent aussi le strict bilan des suppressions d’emplois. C’est la cohésion sociale qui recule, avec in fine un coût bien plus important que les prétendues économies.
Ce qui caractérise aussi ces orientations budgétaires, c’est la difficulté à discerner une vision qui articule le court, le moyen et le long terme sur les grandes compétences de la Région. Pas un mot sur l’environnement, pas un mot sur la formation professionnelle. Quelle est l’ambition pour cette dernière compétence, 2ème poste budgétaire ? S’exclure des dispositifs nationaux par posture politique ? Construire un outil de propagande sur le thème du rejet de l’assistanat ? Culpabiliser et punir ceux qui n’ont plus que les minima sociaux pour survivre ?
Au contraire, construire la qualification des personnes est essentiel pour l’installation et le développement des entreprises sur les territoires, pour fortifier l’économie dans le cadre du futur Schéma régional de développement économique, d’innovation, et d’internationalisation (SRDEII) qui doit être adopté par le Conseil régional avant le 1er janvier 2017.
Les politiques territoriales, elles aussi passées au tamis du ratio comptable, ont perdu toute vision prospective en substituant une politique de guichet à une politique de projet.
Sur les transports, le Conseil Régional fait le choix de l’intervention hors compétence même si le niveau de cette intervention est conditionné à la renégociation du Contrat de plan Etat/Région. S’il est une politique qui doit être menée dans une vision prospective, c’est bien celle des transports puisqu’elle se recoupe de plus en plus avec les enjeux environnementaux. (48000 décès annuels en France dus à la pollution) Dans ce cadre tous les choix de financement doivent viser la réponse aux besoins des salariés, de la population, l’aménagement du territoire, mais aussi la diminution de l’empreinte carbone. La région à son niveau peut participer à ce processus avec des options assumées, notamment le report modal. L’engagement sur la rénovation de l’infrastructure ferroviaire y participe mais sans moyens spécifiques affectés. Au-delà de la sélection des lignes à rénover qui mérite plus d’informations que nous n’en possédons au stade actuel, la question des ressources dédiées doit être traitée, la responsabilité de l’état doit être assumée.
Concernant les ressources, la CGT préconise de nouveaux moyens financiers nécessaires au développement et à l’évolution du TER :
L’État et les Régions doivent renégocier les dotations décentralisées avec l’objectif de réévaluer la part de l’État et mettre en place un système évolutif en lien avec l’augmentation des besoins de transport.
Les Régions doivent disposer d’une ressource fiscale propre et nouvelle telle que le versement transport dont disposent les autres autorités organisatrices de transport :
A titre d’exemple le versement transport sur les entreprises situées hors périmètre de transport urbain au profit des régions prévu dans le cadre de la loi portant réforme ferroviaire à été abandonné par le gouvernement . Sa mise en place effective sur la Région Auvergne Rhône Alpes aurait rapporté autour de 70 millions d’euros soit plus de 14% du budget transport du conseil régional (chiffre 2010).
La mise en place de l’écotaxe est également indispensable au rééquilibrage des modes de transport.
Concernant la Taxe intérieure de Consommation sur les produits de l’Energie (TICPE) il faut revoir le régime d’exonération et le concentrer sur le transport collectif.
Le travail en commission a permis d’intégrer certaines préoccupations de la CGT dans l’avis. Cependant la validation par le texte proposé au vote d’un encouragement à concentrer l’effort sur les dépenses administratives pour assainir les comptes est pour nous inacceptable. Cette posture conduit inévitablement à cibler la masse salariale étant donnée sa part relative dans ces dépenses. Les personnels ont déjà des inquiétudes, des revendications légitimes maintes fois exprimées. La fusion des Régions , le blocage des rémunérations, l’honteuse campagne menée contre les fonctionnaires créent un climat malsain et acte concrètement l’accélération du démantèlement des services publics.
Le CESER, en affichant un tel parti pris ajouterait à ces inquiétudes et ce malaise et préempterait des négociations qui relèvent de la responsabilité des représentants des personnels concernés et non de la société civile.
Par ailleurs, l’avis ne peut pas passer sous silence les dégâts déjà opérés dans les domaines que nous avons mentionnés : culture, protection de la nature, environnement, coopérations décentralisées, humanitaire, etc. tous domaines essentiels à la cohésion et à la sûreté sociales.
Dans ce contexte l’avis du Ceser reste insuffisant, la CGT votera contre.
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Ancien lien : https://www.cgt-aura.org/spip.php?article1272